La chronique d’Éveline Mathelet
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Sèche et archisèche comme les chaussettes de la fameuse archiduchesse

Me voila au pied du mur, c’est à dire à J -1 de la sortie de cette chronique/newsletter etc.. … j’aurais déjà du envoyé mon texte depuis un jour !! Mais voila, rien ne vient. Rien de rien… et je ne veux pas non plus écrire pour écrire. Je me sens vide et sèche, et même asséchée.
Sèche et archisèche comme les chaussettes de la fameuse archiduchesse.


Avec cette sècheresse, cette aridité et ce vide qui m’habitent quelquefois, comme chacun de nous. Je pourrai tricher et écrire quelques banalités sur vata, pitta ou kapha, la grandeur de l’Ayurveda ou je ne sais quoi.

Mais finalement cette sècheresse est en elle même un bon sujet. Je la vois qui me tend ses petites perches et qui s’insinue en moi pour que j’en dise quelques mots.

Que faire quand on se sent sec, vidée, à vide, sans rien, sans fécondité, sans élan, sans envie … ?

Ce qui me vient, c’est juste de laisser le vivant faire son œuvre. Et surtout, surtout, ne rien tenter !!
La vie, la belle et bonne vie qui coule en nous, de manière naturelle et joyeuse, reviendra naturellement et joyeusement irriguer tous nos espaces aujourd’hui asséchés. Il suffit de laisser faire et de faire confiance.
Ne rien faire est souvent la première prescription ayurvedique, ne pas s’en mêler, ne pas chercher à faire, ne pas faire d’efforts.
Simplement faire confiance aux flux naturels, aux mouvements intuitifs, qui reprendront quand ce sera l’heure et le moment. Ce qui est plus facile à écrire qu’à vivre !

Alors, laissons le corps et le mental suivre leurs élans naturels, y compris quand il n’y en a pas… rien ne reste immobile, rien ne reste jamais figé… petit à petit, imperceptiblement, de petits frémissements se feront sentir, de petites impulsions émergeront, … il suffira de les laisser apparaitre, de leur faire de la place puis de les suivre, mais ne rien forcer pour l’instant, accueillir le vide et l’absence d’élans.

Dans le vide, et dans le sec - deux signes de vata - dans le rien, dans l’espace nu, tout peut naitre et apparaitre… il suffit de laisser le temps, l’amour , la tendresse et la bienveillance pour nous-même prendre d’abord soin de notre vide puis des petites pousses qui en émergeront en temps utile.

Prendre soin de nous au plan physique est toujours une bonne option. C‘est une manière d’honorer ce vide précieux et de lui offrir un écrin. Avec trois ingrédients de premier choix : de la douceur, de la douceur, et encore de la douceur. C‘est le meilleur remède à la mélancolie de notre pharmacopée intérieure et extérieure. Une tisane de gingembre frais, un câlin, s’offrir un bon massage à l’huile, une soupe de courge, un pull moelleux, une sieste ou une grasse matinée, une musique douce, une séance de relaxation, regarder un visage aimé, jouer avec un bébé, manger chaud, cuit et onctueux, s’emmitoufler dans une écharpe soyeuse, se trouver un doudou, méditer ou rester tranquille, se coucher tôt, ne pas trop s’exposer aux agitations diverse. C ‘est tout le sens des routines ayurvédiques proposées depuis des siècles : nous doter d’un viatique apaisant et sécurisant pour notre chemin de vie, d’un bouclier antivata pour adoucir nos moments plus arides, plus rudes ou plus rapeux.
Les forces de Vie n’ont nul besoin de nos efforts démesurés ou d’actions drastiques… elles se suffisent à elle même pour nous soigner, nous guérir ou nous montrer le chemin. Elle n’ont besoin que de notre tendresse pour nous même.

Résistons à la tendance de remplir ce vide qui nous habite. Ne nous laissons pas trop happer par les distractions mais savourons tranquillement notre passage à vide.

Au contraire, laissons lui toute la place… il a sa raison d’être.

C‘est comme un "reset" sur un de ces appareils électroniques dont nous croyons utile de nous entourer. Nous sommes en jachère, en hivernage, en rien… Plus tard, une fois nos forces de vies restaurées, l’ensemencement qui s’est fait, souvent secrètement et à notre insu, pourra se déployer pleinement.

L ‘automne annonce l’hiver, la saison du vide où tout se crée, se germe, se commence … alors entourons nous de douceur et laissons au vide et à la sècheresse toute leur juste place.

Bel automne à vous,
L’archiduchesse - aux chaussettes archisèches - :-)

> Eveline Mathelet, présidente de l’association Ayurveda en France